Hommage à Monique Castillo

Monique Castillo nous a quittés le 22 septembre. Nous nous associons à la douleur de sa famille. Elle incarnait, mieux que personne, les Mardis de la Philo. Kantienne affirmée, elle déployait avec …

Hommage à Monique Castillo – Les Mardis de la Philo

Monique Castillo nous a quittés le 22 septembre. Nous nous associons à la douleur de sa famille.  Elle incarnait, mieux que personne, les Mardis de la Philo. Kantienne affirmée, elle déployait avec énergie et générosité une pensée toujours claire, libre et audacieuse.

Ses obsèques auront lieu lundi 30 septembre à 10h30 en l’Eglise Saint-Pierre de Montrouge, Paris 14e.

Je tiens entre les mains un livre de Monique Castillo, Kant et l’avenir de la culture, que j’ai tellement lu, relu, annoté et souligné qu’il en est devenu illisible. Mais en l’ouvrant à n’importe quelle page, je retrouve intacte l’impatience qui m’avait saisie la première fois que je l’ai lu. Car il y a dans la manière dont il est écrit une urgence, presque une injonction : il fallait que ce soit dit et il faut que ce soit lu, au mieux et au plus vite. Le concept chez Monique Castillo est ainsi : impatient. Elle est parvenue à faire de Kant, ce sédentaire scrupuleux de la philosophie, un être de démonstrations mais de passions aussi. Sous sa plume, il prend des accents prophétiques, le rationalisme se fait enfiévré, tout d’enthousiasme et de vigueur. Monique Castillo ne pense pas à moitié.

A la lire, on comprend, et cela saute aux yeux dès le ton des premières lignes, que la philosophie n’est pas une activité pour les tièdes, pas un exercice à faire en milieu protégé et clos, de façon feutrée et mesurée. La philosophie est faite pour emporter, pour avancer. Un combat est à mener, un confort à déranger, Monique Castillo encourage à ne pas faire le pari de la tranquillité. La sincérité, ce talent qui consiste à dire ce qu’on pense et à rechercher la vérité, est, dans ce livre comme dans les autres, dans les cours qu’elle a donnés et auxquels j’ai eu la chance d’assister, bien plus qu’une qualité intellectuelle : une droiture morale – et ce n’est pas rien pour une kantienne. Car ainsi qu’elle le déclare à la toute fin de ce livre que je n’ai finalement jamais refermé : « Kant tient pour l’ennemi du peuple, bien plus que l’ignorance, la dissimulation et l’hypocrisie qui font douter des droits de la raison elle-même. »                                              Laurence Devillairs

1948- 2019

Monique Castillo

« Une philosophie de la paix suppose que la guerre n’est pas l’état ordinaire des relations humaines et qu’il est possible d’instituer la paix en tant que situation normale des relations entre les peuples. »

Monique Castillo, La paix, Optiques Hatier, page 4

Poème de Jean-Pierre Mouzat

Quand venant nous
asseoir, quelque fois le mardi,

On écoute une pensée
en archéologie.

Mécaniques huilées de
bronze et de laiton,

Remuant la poussière
sans l’aide d’électrons,

Systèmes alambiqués
comme des usines à gaz,

Projets naphtalinés
bien rangés dans leurs cases,

Et même quand ils
braconnent dans la littérature,

Ne font pas oublier
que les chaises sont dures.

Enfin ! Certains
mardis, on sort des catacombes,

Un vent acidulé
circule entre les tombes,

Car nous faisons
retour dans ce monde incurable,

Dans ce siècle de fer
et d’anarchie durable,

Confrontés au réel, à
l’angle du présent,

Quittant l’air des
musées on retrouve notre temps,

Où tout homme égaré
cherche à quel rang se mettre,

Commence à
s’angoisser : à quel ordre se soumettre ?

Surtout malgré le
culte d’une raison encensée,

Qui laisse faire aux
hommes tant d’actes insensés.

Heureusement arrive
Monique Castillo.

(Oserai-je le dire,
un peu comme Zorro,

En tout cas c’est
pour elle, qu’on met des strapontins)

Avec gentillesse elle
nous prend par la main,

On regarde en avant,
on s’occupe plus d’hier,

Elle nous donne
aujourd’hui une culture vivrière,

Nous montre le chemin
dans cette vie politique,

Si souvent déroutante, souvent pathologique,

Elle écarte les
ronces, devant nous elle défriche,

Nous fait lire les
signes qu’elle éclaire et déchiffre,

Et malgré les tondus,
les barbus péremptoires,

Qui tous nous
condamnent sans l’usage du prétoire

Nous fait pourtant
aimer cette vie magmatique,

De génome falsifié,
d’erreurs chromosomiques.

Elle nous mène enfin
à l’usage d’un monde,

Dont on a toujours
peur qu’il ne soit qu’une tombe.

L’esprit de Castillo
met en ordre le chaos,

Et tout cela se passe
aux Mardis de la Philo !

~ Jean-Pierre Mouzat – 2008

Article du Monde

Un hommage de Laurence Devillairs

Je tiens entre les mains un livre de Monique Castillo, Kant et l’avenir de la culture, que j’ai tellement lu, relu, annoté et souligné qu’il en est devenu illisible. Mais en l’ouvrant à n’importe quelle page, je retrouve intacte l’impatience qui m’avait saisie la première fois que je l’ai lu. Car il y a dans la manière dont il est écrit une urgence, presque une injonction : il fallait que ce soit dit et il faut que ce soit lu, au mieux et au plus vite. Le concept chez Monique Castillo est ainsi : impatient. Elle est parvenue à faire de Kant, ce sédentaire scrupuleux de la philosophie, un être de démonstrations mais de passions aussi. Sous sa plume, il prend des accents prophétiques, le rationalisme se fait enfiévré, tout d’enthousiasme et de vigueur. Monique Castillo ne pense pas à moitié.A la lire, on comprend, et cela saute aux yeux dès le ton des premières lignes, que la philosophie n’est pas une activité pour les tièdes, pas un exercice à faire en milieu protégé et clos, de façon feutrée et mesurée. La philosophie est faite pour emporter, pour avancer. Un combat est à mener, un confort à déranger, Monique Castillo encourage à ne pas faire le pari de la tranquillité. La sincérité, ce talent qui consiste à dire ce qu’on pense et à rechercher la vérité, est, dans ce livre comme dans les autres, dans les cours qu’elle a donnés et auxquels j’ai eu la chance d’assister, bien plus qu’une qualité intellectuelle : une droiture morale – et ce n’est pas rien pour une kantienne. Car ainsi qu’elle le déclare à la toute fin de ce livre que je n’ai finalement jamais refermé : « Kant tient pour l’ennemi du peuple, bien plus que l’ignorance, la dissimulation et l’hypocrisie qui font douter des droits de la raison elle-même. »

Laurence Devillairs

Nos autres actualités
Actualités conférenciers
Actualités Mardis de la Philo

Qu'est-ce qu'un souvenir de théâtre ? avec Florence Naugrette et Françoise Gillard

Florence Naugrette présentera la dernière conférence de son cycle Que partage-t-on au théâtre ? aux Matinées de la littérature, en présence de Françoise Gillard sociétaire à la Comédie Française
Lire l'article
Actualités partenaires
Actualités conférenciers

La Joie de Charles Pépin au Théâtre Montparnasse

Le sublime seul en scène d’Olivier Ruidavet, adapté de du roman La Joie de Charles Pépin (Allary Éditions, 2015), sera joué au théâtre Montparnasse à Paris, pour 60 représentations, à partir du 30 octobre prochain et jusqu’à la fin décembre.
Lire l'article
Écrivains

Parcours de Pierre Michon en compagnie de Denis Labouret

Cette année, nous célébrons le quarantième anniversaire de Vies minuscules (1984), un livre singulier qui révéla le talent de Pierre Michon. Son oeuvre, malgré sa relative minceur, a suscité nombre d’études savantes et de lectures passionnées.
Lire l'article
Actualités Mardis de la Philo

COMPLET- Visite Musée Bourdelle, 13 novembre 15h

A l’occasion de la réouverture du musée Antoine Bourdelle, nous vous proposons une visite guidée des collections permanentes. Elle sera animée par Jérôme Godeau, commissaire de l'exposition et historien de l’art. Evènement complet.
Lire l'article
Actualités partenaires

Les Grands Entretiens : Rencontre avec William Marx

Les Facultés Loyola et la revue Etudes, partenaires des Mardis de la Philo, vous proposent une rencontre avec le professeur au Collège de France William Marx à l'occasion de la parution de Louée soit la lecture, Lettre au Pape sur la littérature dans la formation (Equateur, 2024).
Lire l'article
No items found.

Pourquoi changer de genre au théâtre ?

La réalité théâtrale a en majeure partie consisté dans le déploiement de techniques théâtrales particulières pour jouer les deux genres. Puisque tout jeu renvoie à des codes, le théâtre -comme la philosophie- peut introduire les spectateurs dans une réflexion sur cette différence des sexes. De là aussi, les résonances entre les problématiques de la scène théâtrale et celles de la scène sociale.
Lire l'article

Inscrivez-vous à notre newsletter
pour suivre notre actualité

Actualités Mardis de la Philo